Le système cyle à air embarqué sur un TER reliant Toulouse à la Tour de Carol
Au siège toulousain de la division Liebherr- Aerospace & Transportation SAS du groupe Liebherr, les perspectives restent positives sur le court et moyen terme. Le chiffre d’affaires a qui s’est élevé à 1,220 milliard d’euros en 2015 va continuer à progresser en 2016 pour atteindre près d’1,3 milliard d’euros en 2016, avec une augmentation moyenne d’environ 4 à 5% par an ces cinq dernières années. Fin 2016, près de 5 000 salariés travaillent chez Liebherr- Aerospace & Transportation SAS, dont plus de 1 200 chez Liebherr- Aerospace Toulouse SAS, centre d’excellence mondial du Groupe pour dans les systèmes d’air, avec un site à Toulouse et un à Campsas dans le Tarn-et-Garonne.
Le siège pilote un réseau d’environ 15 sites à travers le monde. Les bonnes nouvelles proviennent à la fois des activités dans l’aéronautique, et ce principalement dans l’aviation commerciale mais aussi le ferroviaire, voire l’automobile à terme avec toute une série de nouveaux contrats et des produits issus de la R & D interne.
Dans le ferroviaire, la SNCF teste jusqu’en 2018 sur un TER AGC bi-caisse entre Toulouse et La Tour de Carol une technologie de climatisation verte, utilisant uniquement l’air au lieu des gaz réfrigérants traditionnels type HFC, pour refroidir l’habitacle. Le système cycle à air est directement inspiré des systèmes de conditionnement d’air pour l’aéronautique développés par la division à Toulouse. Cette ligne a été choisie car les écarts de température et d’altitude sont particulièrement importants. Le monitoring est effectué dans deux voitures équipées d’un système classique à base de réfrigérant chimique pour l’une et de la technologie cycle à air pour la seconde. Cette nouvelle technologie est déjà embarquée sur l’ICE 3 de la Deutsche Bahn. En ligne de mire figurent le système de conditionnement d’air du futur TGV conduit par le trio SNCF, Alstom et l’Ademe, les prochaines générations de RER à deux étages qui rouleront sur les futures lignes du Grand Paris…. ».
Dans l’aéronautique, le nouveau système de conditionnement d’air E-ECS (« electric environmental control system ») 100% électrique a été testé avec succès le 3 juin dernier à bord de l’Airbus Flight Lab, ainsi que sur un avion d’essai ATR, dans le cadre du programme européen Clean Sky d’avion plus électrique. Avec un nouveau turbocompresseur motorisé (50 kW), l’air est pris directement à l’extérieur sans prélèvement moteur, contribuant à réduire la consommation de kérosène et les émissions de gaz à effet de serre. Liebherr candidatera avec cette technologie pour les futurs programmes de jet et turbo jet dans le monde.
Liebherr -Aerospace et Rolls-Royce ont créé une société commune dédiée à la fabrication d’engrenages servant à la transmission de puissance pour la future génération de moteur Ultra Fan™ qui succédera à la famille Trent. « Nous avons un savoir-faire unique dans les engrenages de très grands diamètres au sein du Groupe Liebherr, et spécifiquement dans les engrenages de haute précision, notamment pour les produits d’autres divisions comme les grues » mentionne Nicolas Bonleux, directeur général et directeur commercial de Liebherr- Aerospace & Transportation SAS.
Autre succès marquant, le système de repliement en bout de l’aile du Boeing 777-X qui lui permettra d’être opérable sur toutes les plateformes aéroportuaires. C’est une première dans l’aviation civile. Les ailes seront repliables après l’atterrissage de 3,5 mètres de chaque côté, réduisant l’envergure de l’avion de 7 mètres qui passera à 64,8 mètres. « Nous avons été sélectionnés par Boeing car nous réunissons de façon unique dans l’aéronautique la maîtrise très poussée des trois compétences que sont la gestion de la puissance hydraulique, les actionneurs et la transmission. C’est un défi technologique d’intégrer ce système de pliage en bout d’aile sur une structure très légère. La fiabilité du verrouillage de l’aile doit être à 100% car son déploiement doit s’effectuer dans les secondes qui précèdent le décollage ». Liebherr fournira par ailleurs sur le B777-X les actionneurs de commandes de vols secondaires, la génération de puissance et le moteur hydraulique du système de commandes de vol.
En 2015, Liebherr a élargi sa base de clientèle dans les hélicoptères en livrant des constructeurs chinois et russes. «La présence locale du Groupe dans ces deux pays, l’agilité en répondant rapidement et la performance dans la durée de nos systèmes, sont des atouts ». Autres projets, la division envisage de commercialiser son savoir-faire en électronique acquis dans le développement des systèmes.
En se projetant sur le long terme, des opportunités ne manquent pas pour garnir le carnet de commandes par exemple une nouvelle version de l’A350, un nouvel avion lancé par l’un des deux grands avionneurs qui inciterait l’autre à réagir, une nouvelle génération de turbopropulseur, le successeur du Super Puma… «Nous avons devant nous des marchés en croissance pour lesquels nous nous préparons longtemps à l’avance. La R & D mobilise 17% du chiffre d’affaires. C’est exceptionnel dans nos métiers. Nos actionnaires familiaux ont une vision de long terme du groupe non coté en bourse, afin de garantir que leur entreprise familiale sera toujours plus solide et indépendante ».
Automobile : le moteur des piles à combustible
Une centaine de véhicules particuliers roulent aux Etats-Unis avec une pile à combustible équipée d’une moto compresseur électrique développée à Toulouse par Liebherr-Aerospace à partir de sa technologie à paliers aérodynamiques à grande vitesse (100 000 tr/mn). Le moto compresseur, fonctionnant sans huile, fournit l'air comprimé et pressurisé, avec des temps de réaction rapides, adaptés aux exigences de l’automobile. Les tests sont très positifs. La division pourrait industrialiser cette technologie pour les prochaines flottes prototypes de véhicules à plus grande échelle si l’hydrogène prend son essor.
Investissement : un nouvel atelier d’usinage à Campsas
Sur Toulouse et Campsas dans le Tarn-et-Garonne, Liebherr- Aerospace prévoit en 2017 d’investir entre 15 et 17 M€. Entre autres, un nouvel atelier d’usinage de 3 000 m2 sera mis en service en octobre 2017. Le site de Toulouse après l’ouverture d’un nouveau centre d’essai et d’un outil logistique, poursuit sa modernisation. « Nous investissons dans l’usine 4.0 avec la digitalisation, la robotisation des process.». Plusieurs sites dans le monde ont été ou vont être modernisés. L’impression 3D est devenue une réalité avec les premières pièces prototypes qui ont déjà volé, l’acquisition de moyens dédiés. A terme, « Nous souhaitons exploiter toutes les possibilités de l’impression 3D, en concevant une pièce d’abord pour son usage, quelle que soit la complexité de sa forme, et non plus en fonction de la capacité à la fabriquer » relate Jean-Luc. Maigne, directeur Général de Liebherr-Aerospace Toulouse SAS.
Supply Chain : « il y a une prise de conscience collective »
« Il y a une de prise de conscience collective de la supply chain. Les performances en termes de livraison et de qualité ont progressé en se rapprochant des standards de performance demandés par nos clients. Les derniers pourcentages sont les plus durs à gagner. Ceux qui ne suivent pas s’excluent d’eux-mêmes » relève Jean-Luc Maigne. Cette évolution positive a été rapportée lors du Liebherr-Aerospace Suppliers Event le 9 novembre dernier. La part achetée à l’extérieur représente 70% de la valeur produit. Près de 300 fournisseurs dans le monde dont une trentaine en région travaillent pour ce donneur d’ordre. La capacité à s’adapter aux fluctuations de la demande fait partie des qualités requises. Quant aux prix, la course à la compétitivité n’est pas près de s’arrêter… sous la pression continue des avionneurs, des compagnies low cost et des consommateurs. En résumé, « Il faut produire une peu moins cher tous les jours ». Pour le built- to- print, la co-ingénierie, des solutions plus compétitives sont attendues. La supply chain est plutôt bien préparée pour faire face aux augmentations de cadence, aux lancements des nouveaux programmes. Par exemple sur l’A320 neo, «Pour certains systèmes complétement nouveaux comme le prélèvement d’air, le ramp-up sera intense en passant de 0 à 60 par mois». L’amélioration des performances passe aussi par les échanges de données qui se sont beaucoup développés entre le donneur d’ordre et ses fournisseurs notamment via la plateforme Air Supply. Liebherr mobilise fortement ses équipes achat et logistique sur ces sujets en s’assurant de la meilleure adéquation charge/capacité de ses fournisseurs y compris pour les rangs 2. La mise en œuvre ou non de doubles sources pour des pièces critiques n’est pas systématique et résulte d’un savant compromis coût/risque.
Maintenance en plein essor
Près d’un tiers de l’activité de la division relève de la maintenance en plein développement avec notamment des sites à Shanghai, aux USA, au Canada, à Singapour, récemment agrandis, en plus des ateliers de réparation de Toulouse et Lindenberg qui ont bénéficié des investissements réalisés sur ces sites. La tendance est à la réparation au plus près des opérateurs aériens pour réduire les cycles. « C’est un marché en croissance, très compétitif avec des nouveaux entrants qui arrivent. Il est important pour nous d’être présents afin de garder un contact direct avec les opérateurs aériens tout en bénéficiant du retour d’expérience » commente N. Bonleux. Liebherr- Aerospace est membre de la société OEM Services avec Thales, Zodiac et Diehl qui se positionne face aux grands du MRO, pour offrir un package complet de services. OEM Services a signé avec Emirates et Singapore Airlines pour la maintenance de l’A380.
Dans le ferroviaire, Liebherr-Transportation Systems a remporté deux contrats récemment avec les villes de Montpellier et Lyon pour la maintenance des systèmes de conditionnement d’air du réseau de tramways. « Nous sommes capables d’être compétitifs sur ces marchés très disputés. Nous optimisons les systèmes existants par exemple en implantant des capteurs de CO2 pour mesurer le taux d’occupation de l’habitacle, en apportant des solutions pour l’obsolescence de l’électronique ». Liebherr intervient aussi dans la maintenance ferroviaire en République Tchèque sur des lignes ferroviaires longue distance, ou encore pour le métro de Londres. « Globalement la maintenance permet de lisser la charge tout en ayant une meilleure profitabilité ».
Chiffres :
Activité de Liebherr- Aerospace & Transportation SAS : centres d’excellence dans le conditionnement d’air à Toulouse, sur les trains d’atterrissage et commandes de vol à Lindenberg en Allemagne, dans le ferroviaire à Korneuburg en Autriche.
Effectif : 5 000 personnes dont plus de 1 200 sur Toulouse-Campsas.
CA : près d’1,3 Md€ en 2016
Article diffusé le 01/12/2016 par JL Bénédini