Lafarge, filiale du groupe Holcim, vient d’investir 120 millions d’euros dans un nouveau four pour son usine de Martres-Tolosane (Haute-Garonne). Objectif : atteindre la neutralité carbone dès 2030.
La cimenterie Lafarge de Martres-Tolosane, construite en 1956, emploie 130 personnes. (Photo : Lafarge)
Avec Fibre Excellence et Sercel, c’est le phare de l’industrie dans le territoire du Comminges, au pied des Pyrénées. A Martres-Tolosane (Haute-Garonne), l’usine de Lafarge, d’une superficie de 130 ha, est présente depuis 1956 et son avenir local vient récemment d’être boosté par sa maison-mère, le groupe Holcim (4200 salariés en France). Jeudi 26 octobre 2023, Carole Delga, présidente PS de la Région Occitanie, nombre d’élus et la direction du site (ainsi que François Petry, le directeur général de Lafarge France) ont inauguré un nouveau four de 120 millions d’euros dont vient de s’équiper l’une des sept cimenteries existantes en France. Long de 60 mètres et d’une hauteur de 110 mètres, il ne passe pas inaperçu le long de l’autoroute A64 ! « Les deux anciens fours, qui étaient longs de 160 mètres, symbolisaient une technologie rustique. Ils dataient de 1956 et 1966. Cette tour à pré-calcination est la meilleure du marché », explique Xavier Brûlé, le directeur de l’usine, arrivé en janvier 2023 de l’usine du groupe à Altkirch, en Alsace.
Maximiser la part de biomasse
L’usine haut-garonnaise produit environ 650 000 tonnes de ciment par an, soit 4% de la production nationale. « C’est l’équivalent de 130 maisons par jour », explique en image Xavier Brulé. Un tel investissement a été pensé pour décarboner la production. Avec cet outil de grande dimension, l’usine espère diminuer de 20% l’énergie pour chauffer la matière et de 30% sa consommation électrique. « L’objectif est d’utiliser 85% de combustibles alternatifs d’ici 2027 et de maximiser la part de biomasse. A ce sujet, l’usine de Martres-Tolosane est la plus performante au sein du groupe Holcim sur la consommation de biomasse », précise le directeur de l’usine, qui emploie 130 collaborateurs et génère 600 emplois indirects.
« Devenir neutre en carbone dès 2030 »
Car les enjeux sont énormes pour Lafarge. Le site commingeois fait partie des 50 plus polluants de France. En novembre 2022, les responsables de l’usine avaient été conviés à l’Elysée par le président de la République Emmanuel Macron pour accélérer la décarbonation de leurs activités, dans le cadre du déploiement du plan France 2030. Mais Lafarge n’a pas attendu ce rendez-vous pour prendre les devants…
Un porte-parole national de Lafarge explique :
« C’est un sujet de longue date chez nous, nous essayons d’avoir les usines les plus performantes. Tous nos ciments sont analysés et normés. Depuis 2020, nous augmentons progressivement la part des déchets dans la composition du CRU (le mélange d’argile et de calcaire homogénéisé et broyé, subissant une cuisson pour obtenir le clinker, composant du ciment, ndlr). Les règles sur les quotas de CO2 vont changer. C’est à nous de nous adapter. C’est pour cette raison que l’ambition de l’usine est de devenir neutre en carbone dès 2030 ».
Un projet pilote attendu en 2025
Ce nouveau four doit être le tremplin de la politique énergétique de l’usine haut-garonnaise de Lafarge. Un projet d’open innovation ouverte aux start-up et aux entreprises, associé à une plateforme de captage de CO2, est en cours sur Martres-Tolosane, en partenariat avec le centre d’innovation du groupe Holcim. « Ce sera un pilote industriel, qui servira à tester différentes technologies. Il s’agira du premier centre de ce type en France », explique Xavier Brûlé.
Un projet qui devrait également amener l’installation d’une station de recharge à hydrogène et qui devrait aboutir courant 2025, avec la création de nouveaux emplois à la clé.
Partenaire du projet Pycasso
L’usine Lafarge est également partie prenante du projet Pycasso (pour Pyrenean Carbon Abolition through sustainable sequestration operation). Il s’agit d’un « programme de territoire pour favoriser la transition énergétique dans l’industrie », expliquent les partenaires du programme. Avec Pau (Pyrénées-Atlantiques) et l’écosystème de Total comme épicentre, ce projet fédère une trentaine d’acteurs autour du pôle Avenia. « Le potentiel est de pouvoir fournir un service terrritorial mutualisé de valorisation et de stockage du CO2, pour une durée minimale de 50 ans », poursuivent les partenaires de ce projet Pycasso.
La cimenterie de Martres-Tolosane transforme des minéraux (calcaire + argile) en chauffant la matière à 1500 °C. On obtient ensuite le clinker, qui sert à fabriquer le ciment, entrant lui-même dans la liste des constituants du béton. Grâce à son nouveau four, la matière va descendre de façon fine avec un circuit plus vertical et plus efficace, et de l’eau chaude qui monte à contre-courant. L’objectif de Lafarge : « Ne pas avoir 100% de clinker dans la composition du ciment et d’en mettre de moins en moins pour le remplacer par d’autres minéraux », explique le groupe.
Une économie circulaire favorisée par les atouts du béton, qui est recyclable à l’infini.