Dans le Tarn, les Poteries d'Albi honorent quatre générations de salariés, dont un à titre posthume

Mettre du lien entre les générations, rendre hommage au passé pour mieux anticiper le futur : voilà des préceptes parfaitement appliqués par Les Poteries d'Albi ! Cette entreprise familiale (23 salariés plus 12 commerciaux et 4 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2023), à l'origine briquetière et tuilière, spécialiste français de la poterie terre cuite émaillée, fait le bonheur du nord du Tarn depuis 1891 avec une première implantation à Lescure-d'Albigeois, puis un déménagement dans le site actuel d'Albi en 1960.

Six générations aux manettes

Lore Camillo, la dirigeante, représente la 6^e génération aux manettes des Poteries d'Albi, façonnée par ses parents Bernard et Elisabeth Bergeal-Camillo. Après avoir grandi au milieu des créations familiales, au gré du savoir-faire unique des artisans, Lore Camillo avait créé la poterie Clair de Terre avant de reprendre l'entreprise familiale en difficulté, en 2015. C'est au moment de prendre les rênes qu'elle a eu l'idée de rendre hommage aux anciens salariés de l'entreprise tarnaise.

"C'est une grande fierté !"

Une idée concrétisée neuf ans plus tard, mercredi 7 février 2024, avec cette cérémonie de remise des Médailles d'honneur du travail à quatre salariés emblématiques des Poteries d'Albi, symbolisant chacun une génération de travailleurs. Cérémonie qui s'est déroulée en présence de Corinne Quèbre, directrice de cabinet du Préfet du Tarn, et Stéphanie Guiraud-Chaumeil, maire d'Albi.

Lore Camillo explique :

"Ce moment est une grande fierté pour moi ! J'avais envie de les mettre à l'honneur car notre savoir-faire est à perpétuer. Cela donne également des repères et de l'espoir à la nouvelle génération".

Daniel, Patrick, Victor... et Bénito

Parmi les salariés distingués, figurent Daniel, dit "banane" - qui a fait les beaux jours des ateliers albigeois de 1974 à 1984 et de 1986 à 2012 -, Patrick (1975-2012), qui a déchargé un nombre incalculable de camions et a connu l'époque où il fallait chercher les poteries directement dans le four et sans élévateur et Victor, le doyen débarqué d'Italie qui fabriquait les moules et a oeuvré avec grande gaieté aux Poteries d'Albi de 1971 à 1996.

Une quatrième Médaille d'honneur du Travail a été remise à titre posthume à l'une des figures de l'entreprise, Bénito, en présence de ses deux fils. "C'était un tourneur comme on n'en a jamais vu, il apprenait l'économie du geste. La poterie était sa deuxième famille, il laissera son empreinte pour toujours ici", rend hommage Elisabeth Camillo.

Labellisée Entreprise du patrimoine vivant

Tourneur, un métier essentiel qui souffre d'une crise des vocations. "Nous avons des problèmes pour trouver des tourneurs", explique Lore Camillo, qui souhaite créer un centre de formation interne pour remédier à ce problème (lire encadré ci-dessous). Pas de quoi perturber la gérante, qui a dû traverser la tempête des tarifs du gaz, avec des hausses allant jusqu'à 272%, entraînant de substantielles économies d'énergie et l'arrêt de deux fours sur trois dans la période la plus turbulente. 

Labellisée Entreprise du patrimoine Vivant (EPV), les Poteries d'Albi perpétuent une tradition et un savoir-faire qui se raréfient. "Tout comme la Poterie Ravel, la Poterie de La Madeleine ou encore la Poterie Goïcoechea, nous faisons partie des dernières poteries familiales françaises", poursuit Lore Camillo.

De quoi susciter l'espoir d'une 7^e génération aux commandes ? Lore Camillo sourit. "Ma fille veut être juriste, enseignante... ou gérante d'une poterie ! Nous avons encore quelques années pour aborder cette question".