Dans le cadre du débat sur la transition énergétique lancé par le gouvernement, les entreprises de la filière vont tenter d’apporter leur point de vue au sein du Comité d’expert via la présence du Medef. Christian Poncet, délégué régional d’EDF en Midi-Pyrénées est le relais local de cette filière d’excellence.
Le gouvernement prévoit de publier la loi de programmation énergétique en septembre 2013. L’objectif annoncé par le président de la République est notamment de faire passer la part de l’électricité dans le mix énergétique français de 75 % à 50% en 2025 et de fermer la centrale de Fessenheim. L’accident de Fukushima a sensibilisé les esprits sur les risques du nucléaire à l’échelle mondiale. Certains pays comme l’Allemagne ou la Suisse ont annoncé leur intention de fermer leurs centrales, d’autres comme la Grande-Bretagne ou la Chine lancent de nouveaux projets. Constatons que jusqu’à présent seul le tsunami a effectivement tué des personnes au Japon. La France avec son parc nucléaire détient un avantage en termes de compétitivité et de production d’énergie sans C02. Les enjeux du débat sont par nature très complexes à appréhender, avec un lobby vert particulièrement offensif ! Le principe de fermer la centrale de Fessenheim qui a reçu l’autorisation de l’ASN de fonctionner dix ans de plus laisse perplexe.
Quels sont les points forts de la production électrique d’origine nucléaire ?
Christian Poncet, délégué Midi-Pyrénées d'EDF : Il y en a quatre. D’abord le prix, nous sommes les moins chers en Europe. Les Français paient leur électricité 35% de moins que la moyenne européenne. Les Allemands payent 50% plus cher et leurs entreprises, plus 33%. 2ème avantage, la filière est devenue le 1er investisseur et va créer 6000 emplois en 2013. 3ème point, grâce au nucléaire, avec l’hydraulique et les énergies renouvelables, la production d’électricité en France génère peu d’émission de C02, soit 67 gr C02/an/habitant, c’est dix fois plus en Allemagne avec 60% d’énergie électrique provenant du charbon. 4ème avantage, le nucléaire pèse peu dans le déficit de la balance commerciale française. Sur 70 Md€, 65% provient de l’énergie dont les ¾ des importations de pétrole, 20% du gaz et 1% de l’uranium.
Le nucléaire est une industrie qui fait peur ?
L’irrationnel domine souvent. Pourtant c’est sans doute l’industrie la plus transparente avec un organisme indépendant, l’ASN, l’Autorité de sûreté nucléaire. L’important c’est la maîtrise du risque. Pour les déchets ultimes à risque de l’industrie nucléaire, c’est un système de stockage réversible à Bure qui a été choisi.
Quel est le mix énergétique idéal à l’horizon 2025 ?
Les besoins énergétiques vont continuer à augmenter. La France comptera 6 millions d’habitants supplémentaires. Le problème sera de produire assez d’énergie pour l’ensemble des besoins. Il est difficile par exemple d’imaginer se passer d’internet ou à terme des véhicules électriques. Le problème climatique demeure, le coût du CO2 va augmenter et la question du comment décarboner l’énergie reste d’actualité. Une des clés sera de maintenir le parc des 58 réacteurs nucléaires. Autoriser 10 années supplémentaires coûte 400 M€ mais c’est dix fois plus pour construire une EPR. L’efficacité énergétique et la MDE doivent être encouragées. Mais l’impact sera long pour améliorer le parc existant, cela prendra au moins une centaine d’années, la construction neuve représente chaque année à peine 1% du parc. Les énergies renouvelables, il faut en faire mais à un coût acceptable et raisonnable.
Certains pays tablent sur les énergies renouvelables pour remplacer le nucléaire ?
Il y a une limite à ne pas dépasser pour les énergies intermittentes comme l’éolien ou le photovoltaïque, d’environ 30% dans le mix global. Il y a déjà eu un cas de rupture de l’approvisionnement en Allemagne suite à un incident sur une ligne provenant de l’éolien menaçant toute Europe par effet de domino. Les énergies de base comme le nucléaire sont indispensables. On ne peut pas substituer le nucléaire avec les énergies intermittentes qui s’arrêtent de produire en l’absence de vent, de soleil. Le problème de coût est majeur. Les énergies renouvelables comme l’éolien ou le photovoltaïque sont subventionnées par tous les clients de l’électricité avec une taxe, la CSPE avec le complément à la charge d’EDF soit 5 M€. L’électricité provenant de l’hydraulique, l’or blanc, au fil de l’eau coûte entre 20 et 50 € / MW, 49,5€ pour le parc nucléaire, 60 à 90 € pour le gaz mais avec du C02, 70 à 90€ avec l’EPR, 70 à 90€ pour l’éolien terrestre, 200 à 800 pour l’éolien offshore, entre 160 et 300 € avec le photovoltaïque. Déjà, aujourd’hui les tarifs régulés ne reflètent pas le vrai prix de l’électricité et EDF vend à perte. Il faudrait aussi se poser la question pourquoi seuls les clients de l’électricité payent le surcoût des énergies renouvelables alors que les consommateurs de fioul, de gaz, de pétrole, de bois ne payent pas.
Quels sont les pistes à suivre ?
L’efficacité énergétique en est une mais il faut aller vers des technologies plus efficaces, moins chères en créant un véritable marché de la rénovation des bâtiments, en formant les entreprises, en ciblant les travaux qui font gagner le plus d’économie d’énergie au lieu par exemple de se contenter de changer les fenêtres. Des progrès technologiques viendront du stockage de l’énergie et les batteries, dans la production d’hydrogène avec des piles à combustible pour produire de l’énergie.
Pour les gaz de schistes, la France pêche par excès de prudence. Le principe de précaution tue l’évolution technologique. Nous devrions d’abord connaître le potentiel existant et développer ensuite des technologies propres pour l’extraire. Avec l’augmentation continue des énergies fossiles la question reviendra d’actualité.