Les récentes réformes, notamment celle de l'assurance chômage, sont autant de charges contre les entreprises. Elodie Zieba, juriste en droit social au sein du Medef de Haute-Garonne, explique les enjeux derrière cette règlementation complexe.
Elodie Zieba, juriste en droit social au Medef de Haute-Garonne. (Photo : Medef de Haute-Garonne)
Conseiller les entreprises n’est pas chose facile, qui plus est en matière sociale où la règlementation a toujours été complexe et changeante. La matière est par essence binaire. Soit une réforme est en faveur des salariés, soit une réforme favorise les entreprises.
L'assurance chômage, un troisième partenaire
Mais récemment, cette relation duale s’est enrichit d’un troisième partenaire : l’assurance chômage. Là où le législateur se contentait de favoriser la compétitivité des entreprises, ou les droits des salariés, il se permet maintenant de déranger cet équilibre très précaire, porté à bout de bras par les partenaires sociaux et les conseillers prud’hommes, en rajoutant un troisième partenaire à l’équation.
Le gouvernement veut faire faire des économies à l’assurance chômage, et ce sont les entreprises qui en assument la responsabilité. Ce mouvement est en cours, et ne semble pas avoir de fin.
Charge n°1 : la présomption de démission
Il était une fois un salarié et un employeur qui s’entendent mal. Le salarié veut partir, mais non démissionner, car il n’aurait pas droit au chômage. L’employeur en a plus qu’assez du salarié, mais refuse la rupture conventionnelle, qui va lui coûter trop cher. Une seule solution : l’abandon de poste. Tout le monde y gagne. Le salarié peut partir vers de nouveaux horizons, et l’employeur peut le laisser partir sans coût.
Cette situation arrangeait tout le monde, sauf l’assurance chômage. Résultat des courses : une réforme du 22 décembre 2022, qui crée une « présomption de démission » pour permettre de priver du chômage les salariés qui ne reviennent plus travailler.
La loi crée une procédure des plus capillotractées, et difficile à appliquer. Et au bout, qui est gêné ? Les entreprises, à n’en pas douter…
Charge n°2 : la fiscalisation des ruptures conventionnelles
Il était une fois une entreprise et un salarié qui ne s’entendent plus, et veulent se séparer sans heurt. L’entreprise est assez fortunée, et disposée à payer au salarié son indemnité de licenciement.
La loi du 28 juin 2008 crée un procédé pour les aider : la rupture conventionnelle. Le salarié bénéficie du chômage et de l’indemnité de licenciement, l’entreprise peut se séparer du salarié sans risque prud’homal. C’était du gagnant-gagnant, jusqu’au 1er septembre 2023, où le gouvernement a taxé de manière très significative l’indemnité.
30% de contribution spéciale sur les indemnités de rupture conventionnelle, qui dit mieux ?
Charge n°3 : le refus de CDI
Il était une fois un employeur qui propose à son salarié de rester en CDI. Le salarié n’est pas intéressé, et décline la proposition.
Le salarié perd son droit à indemnité de précarité, l’employeur lui délivre ses documents de fin de contrat, et les deux parties, adultes et consentantes, se séparent tranquillement.
Sérénité des relations sociales, tout le monde y gagne. Jusqu’au … 1er janvier 2024. Nouvelle charge du gouvernement, qui complexifie encore la situation. L’employeur a dorénavant l’obligation de proposer au salarié un CDI, de lui laisser un délai raisonnable de réflexion, puis de notifier au tout nouveau France Travail les éléments concernant le refus de CDI dans un délai d’un mois.
Conséquence pour le salarié ? Plus d’indemnisation par France Travail au bout de 2 refus. Conséquence pour l’employeur ? Une tonne de paperasserie supplémentaire. La liste des éléments à communiquer est ainsi bien longue : justification du délai raisonnable de réflexion, justification du caractère similaire de l’emploi proposé, du caractère au moins équivalent du poste proposé…
Quelles contreparties ?
L’employeur participe donc activement à l’objectif de réduction de l’indemnisation des salariés par France Travail, ce qui occasionne une complexification de la gestion des relations avec les salariés.
Quelles seront les contreparties ? Les charges patronales relatives à l’assurance chômage vont-elles baisser ? On peut toujours l’espérer…