NAVIGATION PAR SATELLITES : interview de Marc Pollina Dirigeant fondateur de M3 Systems

 

 

Beaucoup d’imagination, un goût prononcé pour l’innovation…si bien qu’il lui est arrivé parfois d’arriver trop tôt sur le marché. Ce qui lui fait dire avec humour « on ne s’enrichit pas forcément en étant précurseur! ». Marc Pollina,  le fondateur de M3 Systems a été un des premiers à lancer dès 2006 un produit de géolocalisation des véhicules destiné aux gestionnaires d’aéroports. Il s’est aussi intéressé au véhicule autonome, avant que ce ne soit un sujet d’actualité.
Tout au long de son parcours, cet entrepreneur a toujours fait preuve d’agilité et de pragmatisme pour trouver de nouveaux débouchés, changer de braquet, saisir de nouvelles opportunités. De quoi alimenter la croissance d’une Pme de la navigation par satellites, qui cette année réalisera un CA avoisinant les 3 M€.

EMP : Cela fait plus de 30 ans que vous travaillez dans les applications satellitaires ?

Marc Pollina : Diplômé de l’Ecole d’ingénieur Télécoms Bretagne en 1982, j’ai démarré ma carrière au sein de l’ESA sur le projet ERS1, un satellite d’observation océanographique.  Me voilà à présent mobilisé sur un drone d’observation de la terre ! Me donnant la sensation d’accomplir un tour de roue complet de l’activité !

EMP : Quels sont les domaines d’expertise de M3 Systems ?

Marc Pollina : Au départ, l’entreprise fondée en 1999, devait développer des récepteurs pour Galileo. En réalité, nous avons surtout effectué de la prestation études pour le Cnes, la DGA, l’ESA… sur deux thèmes majeurs : le traitement du signal lié à la navigation par satellites et le contrôle du trafic aérien pour Eurocontrol. En parallèle nous avons sorti un produit pour la géolocalisation des flottes intervenant sur les plateformes aéroportuaires. L’aéroport de Bordeaux a été notre premier client en 2008. Celui de Toulouse a commandé notre e-tracker dans sa dernière version dotée de nouvelles fonctionnalités.

EMP : Quel est l’intérêt de ce système ?

Marc Pollina : En s’appuyant sur EGNOS hybridé avec d’autres capteurs, il assure une géolocalisation précise des véhicules,  lesquels deviennent aussi communicants avec l’infrastructure sol via une liaison Wifi. Pensé au départ pour sécuriser les pistes, notre dispositif intègre désormais d’autres services, utilisables notamment en maintenance. Equipé d’une tablette, le chauffeur peut par exemple noter en temps réel les anomalies constatées sur son circuit. En ayant fait évoluer notre technologie, nous avons pris position sur le transport intelligent.

EMP : Vous avez gagné des marchés sur le segment automobile ?

Marc Pollina : Concernant le véhicule communicant, nos briques logicielles embarquées permettent un positionnement plus fiable et précis. Le partenariat noué en 2012 avec National Instruments nous a permis de mettre au point des équipements pour tester les systèmes liés à l’utilisation de la radionavigation par satellite (GNSS). Continental en Allemagne a commandé ces moyens de test et mesure. Nous ciblons avec cette offre tous les acteurs de la voiture autonome et communicante. En résumé, nous intervenons à trois niveaux : l’ingénierie pour définir de nouveaux algorithmes de positionnement, les outils de test en laboratoire, les briques logicielles à bord des véhicules accomplissant la fonction positionnement.

EMP : Outre cette diversification dans l’automobile, quels sont les autres événements marquants ?

Revu entièrement par Marc Pollina

Marc Pollina : Depuis 2014, la société AJS est intégrée dans le même groupe que M3 Systems. Cette société basée à Castanet Tolosan fabrique le BOREAL un drone de 4 m d’envergure pesant 20 kg. Cet aéronef peut emporter 5 kg de charge utile et parcourir 1000 km avec une autonomie en vol de 10 heures. Le savoir-faire acquis en positionnement et outils de test est capitalisable pour ces drones dédiés à la recherche scientifique et l’environnement. Ces moyens aériens, opérant sur des zones difficiles d’accès ou sur des étendues océaniques complètent les autres moyens d’observation de la terre que sont les satellites, les avions, les ballons….

EMP : Etes-vous impliqué dans des projets de recherche ?

Sur le projet de R&D collaborative Miriad piloté par Météo France,  c’est notre drone qui embarquera la charge utile. Soutenu par la Région et le FEDER, ce programme qui fédère aussi AJS et un laboratoire d’aérologie, vise à mesurer les flux atmosphériques en survolant la mer à très basse altitude ce qui nécessite un système embarqué adéquat.

L’Onera devrait aussi utiliser un Boréal pour évaluer une large gamme de capteurs.

Par ailleurs, M3 Systems a été retenue sur les projets H2020,  avec Sky Opener qui porte sur l’insertion des drones dans l’espace aérien et avec Mistrale qui a pour objectif de mesurer l’humidité des sols. Nous utiliserons à cet égard, les signaux satellitaires : ceux  réfléchis par le sol croisés avec ceux reçus directement par le drone.

Quant à Sky Opener, notre compétence acquise en matière de contrôle aérien nous sera bien utile.

EMP : Sur les métiers du contrôle aérien, quel est votre business actuel ?

Marc Pollina : L’Europe finançant  une nouvelle tranche du système SESAR, nous avons gagné deux contrats avec Eurocontrol pour étudier les nouveaux concepts liés à la gestion des flux.

EMP : Et sur l’avenir commercial du e-tracker ?

Marc Pollina : La certification européenne des aéroports plaide en faveur de notre solution. Nous allons la présenter aux exploitants  des plateformes, en mettant en avant les nouvelles fonctionnalités du produit. Selon l’affectation des véhicules, on pourra renforcer la navigation de précision sur certains ou ne placer que des services génériques sur d’autres. Ce sera à la carte.

Emma Bao
Diffusé le 30 octobre 2015

A noter

M3 Systems est implantée à Lavernose

-La holding Mistral coiffe trois filiales : M3 Systems, M3 Systems Belgium et AJS

-Effectif total : 40 personnes

CA 2015 : 2,9 M€, prévisionnel 2016 : 3,5 M€ visés

 

Engagements

Président de la plateforme GUIDE, laboratoire d’essais en geolocalisation par satellites qui opère des essais GNSS1 en vol pour l’aviation civile, Marc Pollina est aussi adhérent du Pôle de compétitivité Aerospace Valley. A 57 ans, le dirigeant de M3 Systems maintient intacte sa passion pour le métier d’entrepreneur qui capte l’essentiel de son temps. Et s’il devait pratiquer un loisir, il se tournerait vers la sculpture, un goût hérité de son père tailleur de pierre dans le sillage de sa famille originaire de Carrare.

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