Occitanie. La Cour des comptes passe au crible trois aéroports de la région

Mardi 18 juillet 2023, la Chambre régionale des comptes d'Occitanie publiait un rapport sur la gestion de la Société publique locale aéroportuaire régionale (SPLAR). L'occasion de faire un point sur la situation financière de nos aéroports.

Le dernier rapport de la Chambre régionale des comptes d'Occitanie pointe notamment la "fragilité juridique" de la liaison entre Tarbes-Lourdes et Paris-Orly. (Photo : Office de tourisme de Lourdes)

Le dernier rapport de la Chambre régionale des comptes d'Occitanie pointe notamment la "fragilité juridique" de la liaison entre Tarbes-Lourdes et Paris-Orly. (Photo : Office de tourisme de Lourdes)

Belle fréquentation, nouveau centre d'affaires, liaisons directes vers Montréal (Canada) et Dubaï (Qatar)... L'aéroport Toulouse-Blagnac affiche une belle vitalité en 2023. Mais quid des autres aéroports régionaux en Occitanie ? Pour le développement du tourisme ou l'appel d'air du low cost, les aéroports de proximité offrent un équilibre territorial qui permet de ne pas tout le temps se rendre dans la Ville rose. Mais l'équilibre économique est-il pour autant au rendez-vous ?

Mardi 18 juillet 2023, la Chambre régionale des comptes d'Occitanie a publié un rapport sur la gestion des aéroports régionaux et en particulier sur la Société publique locale aéroportuaire régionale (SPLAR, qui emploie près de 300 salariés), créée en juillet 2019 et qui gère l'exploitation des aéroports de Tarbes (Hautes-Pyrénées), Carcassonne (Aude) et Perpignan (Pyrénées-Orientales). Trois aéroports qui présentent des fréquentations variant, en moyenne, de 350 000 (Carcassonne) à 750 000 passagers par an (Perpignan et Tarbes-Lourdes).

Pertes d'exploitations et économies de gestion

Une SPLAR qui a accusé, en 2022, 12 millions d'euros de pertes d'exploitations en dépit de la reprise du trafic aérien. Mais sa création "a permis de réaliser des économies de gestion, représentant la moitié des frais de siège précédemment acquittés auprès des opérateurs privés", félicite la Chambre régionale des comptes.

"L'aéroport de Perpignan concentre son activité sur le trafic domestique, avec une ligne le reliant à Paris-Orly, alors que les vols internationaux, principalement à bas coût depuis des villes d'Europe du Nord, représentent l'intégralité de l'activité de l'aéroport de Carcassonne. L'activité de l'aéroport Tarbes-Lourdes, plus diversifiée, est portée par l'organisation de pèlerinages rejoignant la cité mariale par des vols charters et à bas coût en provenance d'Europe et du monde entier", explique en préambule la Cour des comptes régionale.

Le rapport pointe un "maillage aéroportuaire dense" et une "exploitation déséquilibrée des trois aéroports, les recettes générées par le trafic aérien étant trop faibles au regard des charges supportées. Cette situation caractéristique des 25 aéroports français réalisant un volume de trafic annuel inférieur à un million de passagers rend indispensable une aide publique".

Tarbes-Paris, une ligne "fragile" ?

Le gendarme financier d'Occitanie a notamment mis l'accent sur la situation de l'aéroport Tarbes-Lourdes, pointant du doigt "la concurrence sur son territoire par celui de Pau tout proche" et "le financement public peu robuste dans ses fondements juridiques et économiques de la ligne d'aménagement du territoire reliant Tarbes-Lourdes à Paris". Au coeur d'un "tourisme atypique", qui repose beaucoup sur les pèlerinages et le tourisme marial - "le sanctuaire de Lourdes se place parmi les 20 monuments les plus visités au monde", rappelle la Chambre - cet aéroport pourrait trouver des complémentarités plus fortes avec celui de Pau (Pyrénées-Atlantiques) selon la Cour des comptes régionale, ce qui ferait par ailleurs baisser le bilan carbone. Cette dernière considère que la ligne aérienne est "fragile juridiquement" et "ne remplit plus les conditions réglementaires propres aux Lignes d'aménagement du territoire".

La réponse de Carole Delga

Face à ces critiques, Carole Delga, la présidente PS de la Région Occitanie, rappelle d'abord que "l'Occitanie fait partie des premières régions touristiques d'Europe", que "l'aéronautique représente 100 000 emplois dans la région" et que "60% des Français domiciliés à plus de 4h de train de Paris habitent en Occitanie". Sur la ligne Tarbes-Paris Orly, elle se place en désaccord avec la Cour des comptes.

"La LAT reliant Tarbes-Lourdes à Paris-Orly bénéficie d'un financement de l'Etat de 1,2 million d'euros pour la période 2018-2022 et de 4,5 millions d'euros pour la période 2022-2026. Et dans le cadre de l'axe 5 du "Plan d'avenir pour Lourdes ambition 2030", la mesure 98 est intitulée "Pérenniser la ligne Paris/Tarbes-Lourdes-Pyrénées".

Concernant l'aéroport de Perpignan, Carole Delga et la Cour des comptes sont sur la même longueur d'onde : "Cet aéroport est peu concurrencé au sein de sa zone d'attraction par les aéroports voisins, la liaison avec paris est nécessaire compte tenu de son éloignement géographique et de l'absence avant de nombreuses années d'une desserte ferroviaire à grande vitesse".

Quant à Carcassonne, le trafic de l'aéroport audois dépend à 94% de la compagnie Ryanair, mais avec une part de 88 %% des vols non commerciaux en raison de l'existence d'une antenne de l'Enac, et du rôle croissant de cette plateforme dans la lutte contre les incendies.

Des "points de fragilité"

Enfin, la Chambre régionale des comptes a identifié sur le sujet "trois points de fragilité". Les voici dans le détail :

"D'une part, la croissance du trafic des trois plateformes repose avant tout sur le recours aux compagnies aériennes à bas coût et s'accompagne de dépenses marketing facturées par passager qui sont supérieures aux redevances acquittées par ces compagnies. D'autre part, annoncée par les lignes directrices de la Commission Européenne pour 2024, la fin des aides publiques aux aéroports ne fait l'objet d'aucune anticipation de la SPLAR et des concédants, alors même que l'application de ce texte pourrait avoir des conséquences majeures".

Un point soulevé sur lequel Carole Delga se veut très claire. "Il faudra que les autorités nationales et surtout européennes assument une position claire : soit ces aides sont légales, soit elles ne le sont pas. Et qu'elles ne se contentent pas d'une appréciation au cas par cas, facteur d'insécurité juridique pour les exploitants de plateformes aéroportuaires, et qui seraient placés en position de fragilité concurrentielle par rapport à d'autres plateformes".

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