Le cluster Robotics Place et l’école d’ingénieurs UPSSITECH organisaient le 6 octobre un séminaire sur l’éthique en robotique. A l’heure où les objets connectés, voitures autonomes, drones et robots collaboratifs sont près d’arriver sur le marché, professionnels et chercheurs s’interrogent sur les limites de l’interaction homme-robot, limites que la technologie repousse sans cesse.
Fabrice Robert de SOGETI High-Tech a proposé en introduction, une réglementation définissant des autorisations de mise sur le marché et des expérimentations, à l’image de l’industrie pharmaceutique.
Catherine Tessier, chercheur à l’ONERA spécialisée dans le partage d’autorité entre l’homme et la machine, définit le robot comme une machine commandée par un ordinateur, qui se meut dans l’espace physique. Le robot acquiert des données par l’intermédiaire de capteurs et les interprète via ses algorithmes, pour prendre des décisions relatives à des actions qu’il exécute dans l’espace physique. Les principales propriétés d’un robot sont sa réactivité à répondre aux changements de son environnement, son orientation vers les buts à atteindre et son autonomie lui permettant d’agir sans l’intervention d’un autre agent (humain ou machine) dans des environnements complexes, dynamiques et imprévisibles. Il est différent des autres objets parce qu’il peut bouger et qu’il ressemble à un être vivant par son aspect, son comportement et son raisonnement. Il peut en outre se substituer à l’homme dans des contextes de surveillance ou d’assistance. Ce sont ces particularités qui sont à l’origine de la démarche d’éthique menée par les professionnels de la robotique. L’éthique, qui est définie comme une réflexion relative aux conduites humaines et aux valeurs qui les fondent, est une démarche qui devra être menée durant toutes les phases de la réalisation d’un robot (recherche, conception, usage), en tenant compte de l’impact sur la société. C’est ainsi qu’en 2014 le Conseil d’Etat a recommandé que tout ce qui devient techniquement possible ne doive pas être nécessairement permis. Une question se pose en particulier : peut-on doter un robot d’un comportement éthique qui lui permettrait de faire des choix comme un conducteur ou un médecin, en situation difficile ? Quelle part de subjectif le concepteur mettrait alors dans le programme ?
Nathalie Nevejans, maître de conférences à la faculté de droit de Douai, a ensuite abordé les enjeux juridiques liés à la robotique. Le droit a déjà traité les cas des robots industriels et chirurgicaux, mais pas ceux des robots de service à la personne. Dans ce cas, on peut imaginer que le robot devienne un biais d’instrumentalisation de l’homme, si ce dernier établit des liens avec son robot. D’autres atteintes à la personne ont été citées comme la responsabilité des dommages physiques, la liberté de la personne, la vie privée et la rupture des liens sociaux. Plus généralement, la législation devra s’adapter aux progrès de la robotique.
Laurent Latorse, président du cluster Robotics Place, a montré les méthodes d’expérimentation mises en œuvre par les membres du cluster. Ces méthodes consistent à tester les robots dans des conditions les plus proches possibles de la réalité, dans la zone d’activité du Bois Vert, située dans l’ancienne base aérienne de Francazal.
Hubert Tissot, directeur innovation aux Senioriales, a souligné l’importance que revêt l’avis de l’utilisateur dans le choix d’un robot d’aide à la personne dans le cas des seniors. Deux projets sont en cours pour l’accompagnement et l’accueil. Les cahiers des charges ont été établis en coopération avec les adhérents utilisateurs. Ces derniers ont fait part de leurs interrogations au sujet des risques d’atteinte à leur liberté et des limites de leur autonomie.
Le projet MIAOU (Méthode Itérative d’Analyse Orientée Usages), mis en œuvre par une équipe de sociologues, a été présenté. Il permet de définir des objets et des services au plus près des usagers, en s’appuyant sur l’observation et l’analyse des pratiques quotidiennes des personnes âgées. La robotique peut aider la personne à domicile, avec son consentement et à condition de ne pas supprimer ses liens sociaux et sa liberté.
Mario Martinez
Diffusé le 1er décembre 2016